Produire des connaissances, faire collaborer professionnels et chercheurs

Lettre de l'InSHS Droit

#À PROPOS

Après deux ans de fonctionnement dans sa nouvelle configuration, l’Institut des études et de la recherche sur le droit et la justice (IERDJ) qui résulte de la fusion de la Mission de recherche Droit et Justice (MRDJ) et de l’Institut des Hautes Études sur la Justice (IHEJ) déploie ses activités et confirme sa place centrale entre le monde de la recherche en sciences humaines et sociales et les praticiens du droit et de la justice, les institutions étatiques et les juridictions. Cette interface et son exigence de pluri ou d’interdisciplinarité constituent les caractéristiques essentielles de l’activité de l’IERDJ et des travaux qu’il encourage, à côté d’une activité toujours plus importante de passeur entre le monde de la recherche et celui des professionnels et des décideurs.

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Membres du conseil scientifique de l'IERDJ, juin 2023 @ Claire Ruiz, IERDJ

Soutenu dès sa création par le CNRS, l’Institut succédant à la Mission de recherche Droit et Justice, l’IERDJ s’inscrit pleinement dans la perspective de décloisonnement entre les disciplines et de valorisation des travaux scientifiques dans différents milieux.

En effet, et conformément aux termes de sa convention constitutive, ce Groupement d’intérêt public promeut « une réflexion originale et prospective, le développement de la recherche et son soutien, ainsi que la mobilisation et la diffusion des connaissances sur les normes, la régulation juridique, les missions et le fonctionnement de la justice, dans tous les champs disciplinaires pertinents », dans le cadre de la programmation scientifique validée par l’assemblée générale de ses membres. Les activités développées au cours de ces deux années illustrent l’importance de son implantation, tant s’agissant de la promotion et du suivi de recherches conduites par les chercheurs que s’agissant d’études menées à son initiative, en s’associant là encore avec des chercheurs. Les activités de valorisation des travaux se sont également développées pendant cette période.

Les appels à projets de recherche : éclairer le fonctionnement du droit et de la justice

Les appels à projet thématiques, qui s’inscrivent dans la programmation scientifique de l’Institut, doublent une campagne de dépôt de projets spontanés ouverte jusqu’à ce jour deux fois par an (prochaine date limite de dépôt le 16 janvier 2024). Par définition instable, le nombre de recherches actuellement suivies est d’environ soixante.

Cette activité traditionnelle héritée de la MRDJ permet de susciter et de financer des travaux dans toutes les disciplines aptes à éclairer le fonctionnement du droit et de la justice. Elle s’articule avec les priorités thématiques retenues à l’initiative de l’IERDJ, parfois parce que des travaux menés en interne permettent de préparer des appels à projets, parfois parce que des travaux de recherche menés en interne viennent enrichir notre réflexion. Le positionnement de l’Institut favorise en outre l’ouverture des terrains et, plus important encore, la possibilité pour les chercheurs et chercheuses d'échanger avec les acteurs et décideurs professionnels et de discuter leurs points de vue.

Depuis sa création, l’IERDJ a renforcé son Conseil scientifique, passé de dix-huit à vingt-cinq membres actuellement. Cette évolution permet de mieux répondre à la multiplicité des thèmes abordés. Composé aux deux tiers de chercheurs, le Conseil scientifique présente cette particularité d’accueillir également des acteurs du droit et de la justice.

En 2023, les appels à projets de recherche lancés ont concerné la justice sociale (évolutions des contentieux et office des juges) et la justice des relations économiques (acteurs, pratiques, fonctionnement, usages et représentations), ainsi que l’exécution des décisions en matière environnementale et les métiers des greffes et autres personnels au soutien de l’activité juridictionnelle. Par ailleurs, le thème « Besoins, demandes et attentes de justice » fait l’objet d’une réédition semestrielle pendant trois années consécutives. Sur l’ensemble, douze projets ont été reçus et sept retenus.

Pour 2024, quatre thèmes ont été retenus : « Environnement et santé », « Consentement », « L’accès au travail des personnes placées sous main de justice » et « Droit, justice et espace(s) ». Ces appels à projets seront clôturés au 5 mars 2024.

Parallèlement, vingt-sept projets spontanés ont été présentés au Conseil scientifique au titre de l’année 2023 (vingt-et-un en 2022) et douze ont été retenus (dix en 2022), dans les domaines les plus divers, tels que, sans exhaustivité, la parenté transgenre, la justice algorithmique, les violences conjugales (contrôle judiciaire) ou cyber pédopornographiques, la prévention juridictionnelle des dommages environnementaux ou le rôle des juridicités autochtones dans l’élaboration d’un droit des générations futures, ou encore les effets procéduraux de l’instauration du Code de la Justice pénale des mineurs. À chaque fois, le Conseil scientifique veille à la dimension pluridisciplinaire de ces projets et favorise les approches empiriques.

Les études et manifestations menées par l’IERDJ : de la demande urgente à la réflexion sur le long terme

En parallèle et en complémentarité de l’activité traditionnelle héritée de la MRDJ, l’Institut produit des réflexions issues de ses propres rangs ou sollicitées auprès de chercheurs extérieurs. Les études et manifestations menées à l’initiative de l’IERDJ répondent parfois à une demande des acteurs publics, soumise à un temps plus bref. Mais même dans cette hypothèse, l’Institut s’appuie sur des travaux de long terme pour répondre à des besoins parfois immédiats de nos partenaires et constitue un lieu de croisement et de débats entre institutions relevant parfois de logiques différentes.

La réflexion sur les droits des générations futures, qui a fait l’objet d’une publication a ainsi réuni un panel de spécialistes autour de cette thématique, s’appuyant sur un groupe de chercheurs et chercheuses internationaux, de juges et de militantes associatifs de longue date pour promouvoir une notion devenue maintenant centrale dans les débats juridiques. Autre exemple d’activité de réflexion, le séminaire Justice et Guerre permet de mobiliser les sciences sociales pour une analyse de fond et sereine de questions parfois brûlantes.

L’Institut prévoit, pour ce type d’activités, un comité scientifique qui accompagne les auteurs de ces productions. Composé de trois à cinq personnes sélectionnées en raison de leur compétence, il aide l’IERDJ à choisir les contributeurs sollicités, à dialoguer avec eux dès le début du processus puis au cours du travail, à identifier des questions nouvelles, à développer l’interdisciplinarité et, au final, à partager un regard évaluatif sur leurs travaux.

Des formats variés pour valoriser les travaux de recherche

Convaincu de l’importance de diffuser au mieux les travaux de recherche et les études auprès des professionnels comme des décideurs, et répondant en cela aux objectifs qui lui ont été assignés, l’Institut multiplie les canaux de diffusion. La diversité des formats permet de cibler différents publics, au plus près des acteurs concernés. Outre les synthèses des rapports de recherche, dont nos partenaires sont systématiquement destinataires, sont organisées des restitutions orales (colloques, Arrêts sur recherche) et écrites des travaux (Actu’recherche), parallèlement à des réunions de présentation plus confidentielles, organisées en concertations directes avec les services ministériels et les professionnels et permettant des rencontres avec l’équipe de recherche, éventuellement avant même la remise du rapport définitif. L’attribution du prix de thèse Carbonnier constitue encore une autre façon de valoriser les travaux sur le droit et la justice. Pour reprendre les termes de Kathia Martin-Chenut, directrice adjointe scientifique du groupement d’intérêt public de 2017 à 2022, l’objectif est d’« intégrer la recherche dans l’action ». C’est un objectif ambitieux, chronophage et enthousiasmant.

Les projets de développement des activités de l’IERDJ se bousculent, qu’il s’agisse de mieux prendre en considération les attentes des justiciables et des citoyennes, de mieux identifier les impacts et potentiels des développements du numérique sur les métiers du droit et de la justice, de renforcer nos réseaux internationaux pour développer les approches comparatives ou de proposer une analyse prospective des enjeux du droit et de la justice dans notre société, répondant là encore aux missions qui lui ont été confiées. Ce dernier objectif n’est pas entièrement nouveau car l’IHEJ avait de longue date été capable d’identifier des tendances émergentes. Toutefois, ce type d’analyse commence à être systématisé et s’appuie sur le triptyque « veille, exploration et analyse ».

Par sa capacité à relier les mondes de la recherche, de la décision publique et des acteurs spécialisés, mais aussi à fournir des travaux rigoureux à l’ensemble des publics, l’Institut répond aux enjeux de diffusion de la science promus par le CNRS. L’ensemble de ses publications sont accessibles en ligne, conformément aux orientations « science ouverte ». Les chercheurs et chercheuses sont fortement mobilisés, accompagnés et soutenus dans la valorisation de leur travail.

Contact

Isabelle Sayn
Directrice de recherche CNRS, directrice adjointe scientifique de l’IERDJ