Trois questions à Valérie Lemarchandel, sur la Fondation pour la Recherche Médicale
#TROIS QUESTIONS À...
Premier financeur caritatif généraliste de la recherche médicale en France, la Fondation pour la Recherche Médicale (FRM) soutient depuis plus de 75 ans des projets de recherche sur toutes les pathologies : cancers, maladies cardiovasculaires, maladies infectieuses, maladies neurologiques et psychiatriques… En adoptant une démarche pluridisciplinaire, la FRM encourage, sélectionne et finance chaque année plus de 350 nouveaux projets de recherche prometteurs sur toutes les maladies. Valérie Lemarchandel, directrice scientifique de la FRM, revient sur les missions et activités de la Fondation et sur l’intérêt qu’elle présente pour les chercheurs et chercheuses en sciences humaines et sociales.
Pouvez-vous nous rappeler ce qu’est la FRM, quelles sont ses missions, son mode de fonctionnement ?
La Fondation pour la recherche médicale (FRM), créée en 1947 par des chercheurs et des médecins et reconnue d’utilité publique en 1965, a pour vocation de contribuer au développement de la recherche biomédicale publique en France au travers de deux missions : soutenir financièrement et accompagner les travaux de recherche les plus prometteurs et leur permettre d’aboutir au plus vite, et informer le public des enjeux et des avancées de la recherche biomédicale.
Privée et indépendante, la FRM ne reçoit aucune subvention de l’État et agit exclusivement grâce à la générosité de ses donateurs, testateurs et entreprises partenaires. Pour exercer sa mission d’intérêt général, la FRM met en place des actions de communication et de collecte auprès du public pour réunir des fonds.
La FRM déploie ses activités dans différents domaines d’action dont des axes prioritaires. Quels sont-ils et quelles sont les initiatives mises en place par la FRM pour faire connaître ces actions ?
La FRM est aujourd’hui le plus important financeur caritatif de l’ensemble de la recherche biomédicale académique en France. Chaque année, la FRM finance ainsi, dans un cadre quasi exclusif d’appels à projets (AAP), environ 350 nouveaux projets pour un budget moyen total de 45 à 50 millions d’euros.
Le positionnement de la FRM est unique dans le paysage de la recherche biomédicale française. Elle est, en effet, le seul organisme caritatif à soutenir des projets dans tous les domaines et sur tout le continuum de la recherche biomédicale : des travaux les plus fondamentaux aux projets de recherche clinique, sur toutes les échelles du vivant et sur une palette de modèles d’étude. Elle offre aux équipes de recherche divers soutiens principalement via deux grands programmes : un programme généraliste et un programme thématique.
Dans le cadre de son programme généraliste, la FRM soutient des projets de recherche dans tous les domaines de la recherche afin de multiplier les pistes à explorer et générer des retombées en biologie et en santé. Ce programme est également destiné à apporter un soutien fort à la formation des jeunes chercheurs et chercheuses en les soutenant à des moments clés de leur carrière et en favorisant, pour certains, le retour en France. La FRM accompagne également l’installation en France de nouvelles équipes de recherche et s’engage au long terme aux côtés d’équipes à haut potentiel. Ce positionnement généraliste permet d’apporter un soutien fort à la recherche fondamentale, source de nouveaux outils, de concepts innovants et de progrès.
Le programme thématique permet, depuis 2019, à la FRM de se positionner sur des domaines de recherche définis comme prioritaires. L’objectif est de donner un coup d’élan à des secteurs ou des domaines en émergence ou peu soutenus ainsi qu’à des recherches à l’interface entre la biologie et les autres disciplines.
Ces domaines sont : Covid et émergences (AAP 2022, 2021 et 2020), Médecine réparatrice (AAP 2022 et 2021), Impact des facteurs environnementaux sur la santé (AAP 2023, 2021 et 2020), Approches interdisciplinaires pour comprendre les mécanismes fondamentaux des maladies neurodégénératives (AAP 2023 et 2020), Approches interdisciplinaires pour comprendre la maladie d’Alzheimer (AAP 2019).
Depuis 2019, la FRM renforce son engagement aux côtés des chercheurs et chercheuses et de leurs projets. Elle propose ainsi un soutien aux responsables d’équipe dans leur activité de management, un accompagnement des chercheurs dans leur prise de parole auprès des médias et la mise en réseau des chercheurs toutes disciplines confondues.
L’une des ambitions de la FRM est d’acquérir une meilleure connaissance des effets des facteurs environnementaux sur notre santé. Vous avez lancé à cet effet il y a deux ans un appel spécifique santé environnement et avez organisé, en mai dernier, une conférence de presse pour présenter quatre des projets lauréats à la croisée des sciences humaines & sociales et des sciences biomédicales, pour mieux prévenir les risques pour la santé. Pourquoi avoir souhaité intégrer les SHS à cette réflexion ? Quelle est leur plus-value ? De manière générale, comment les SHS peuvent-elles s’insérer dans l’ensemble des dispositifs mis en place par la FRM ?
L’impact de l’environnement sur la santé ne fait plus de doute. Le défi est de comprendre l’effet des expositions auxquelles nous sommes soumis toute la vie. Il s’agit non seulement d’un enjeu de santé publique, mais aussi d’un enjeu économique et social. Les sciences biomédicales ne peuvent donc à elles seules apporter toutes les réponses.
Les sources d’exposition aux contaminants nocifs pour la santé sont multiples (air, alimentation, contact direct). En parallèle, le milieu professionnel, le lieu de vie, le niveau socio-économique entraînent des inégalités d’exposition, souvent corrélées avec ou renforcées par les inégalités sociales.
Il y a deux ans, nous avons donc repensé les ambitions de notre axe prioritaire grâce à un travail prospectif et des rencontres avec différents acteurs dont CNRS Sciences humaines & sociales. Notre appel à projets Environnement et Santé 2023 (reconduit en 2024) soutient des recherches non seulement sur l’action des agents environnementaux dans la survenue de maladies, mais aussi sur la compréhension des logiques économiques, sociales et sanitaires contribuant à ces expositions délétères. Pour cela, les équipes soutenues associent des chercheurs et chercheuses en sciences humaines et sociales. Un décloisonnement et une conjugaison des disciplines qui, certes, demandent de la persévérance, mais sont nécessaires au vu des enjeux sociétaux que représente la santé environnementale
Quatre projets ont ainsi été retenus en octobre 2023 pour un soutien total de 2 millions d’euros. L’un d’eux étudie, par exemple, les effets des températures extrêmes sur la santé maternelle et infantile au Sénégal et les stratégies locales de résilience.
Dans les années qui viennent, la FRM a l’ambition de contribuer à éclairer le grand public et les décideurs sur les effets de l’environnement sur notre santé et celle des générations à venir. Depuis 2022, cet engagement fait l’objet d’une communication auprès des journalistes, lors d’une conférence de presse à l’occasion de la journée mondiale de l’environnement en juin et auprès du grand public via des publications par exemple dans notre revue trimestrielle Recherche & Santé ou encore en organisant des rencontres entre des chercheurs et chercheuses investis sur ces sujets.