Les Cuisines de la nation
En quelques décennies, les écoles ont été vidées de leurs cuisines, de leurs cuisiniers, des produits bruts, de la terre. Des usines de production, nommées « cuisines centrales », sont désormais chargées de nourrir nos enfants.
Tout comme la révolution « verte » qui détruit l’agriculture paysanne, les cuisines sur place disparaissent au profit de l’agroindustrie, dont une petite poignée de groupes qui monopolisent la restauration collective en France. C’est l’acte même de se nourrir qui est déconsidéré, ainsi que le travail de soin assuré par les « dames de cantine ».
En outre, les intérêts de l’industrie et de l’État se trouvent mélangés dans l’assiette, où certains produits deviennent indispensables au nom de l’identité nationale – souvent au prix de l’exclusion des enfants d’origine migratoire des quartiers pauvres, censés être les premiers bénéficiaires de la cantine scolaire.
Or la cantine est une précieuse opportunité de faire entrer les paysans à l’école, de se reconnecter au monde vivant, et de mieux considérer les choses et les personnes. C’est la vision portée par des mouvements de résistance, qui plaident pour le retour de la cuisine sur place, afin d’associer l’école à son milieu et de refaire le lien entre producteurs paysans, cuisiniers et mangeurs.
Une enquête rigoureuse qui sonne l’alarme sur l’industrialisation de la cantine scolaire.
À propos des auteurs
- Geneviève Zoïa est anthropologue, professeure à l’université de Montpellier (faculté d’éducation). Elle a notamment publié La Laïcité au risque de l’autre, L’Aube, 2015.
- Laurent Visier est sociologue, professeur à l’université de Montpellier où il dirige le département de sciences humaines et sociales au sein de la faculté de médecine Montpellier-Nîmes. Il a codirigé l’ouvrage Médecine, santé et sciences humaines, Les Belles Lettres, 2021.