La SFDAS fête ses 50 ans et remet au Musée national du Soudan des objets archéologiques majeurs
En 2019, la Section française de la direction des antiquités du Soudan (SFDAS) célèbre ses cinquante ans d’existence. Une semaine de festivités, consacrée à la SFDAS et au patrimoine soudanais, est prévue du 15 au 20 septembre à l’Institut Français de Khartoum et au Musée National du Soudan. Ces événements sont placés sous l’égide de l’Ambassade de France au Soudan.
Des conférences archéologiques seront organisées ainsi qu’une exposition consacrée à l’archéologie française, autour du travail du photographe Claude Iverné, lauréat du prix Henri Cartier-Bresson 2015 pour l’ensemble de son travail soudanais, et membre associé de la SFDAS.
À l’occasion de cette semaine spéciale, trois objets archéologiques majeurs, provenant de fouilles françaises, seront rendus au Musée national du Soudan, le 19 septembre : un relief de la Candace d'el-Hassa, la stèle méroïtique de la dame Ataqelula, mis au jour en 2016 dans la nécropole de Sedeinga et un panneau sculpté du premier temple de Soleb, restauré en 2017.
La Candace, fameux personnage royal et reine-mère à l’époque méroïtique (IIIe s. av. J-C - IVe s. ap. J-C.), est régulièrement représentée sur les parois et façades de temples soudanais. A el-Hassa, en plein cœur du royaume, celle-ci apparait dans la décoration en plâtre peint de la façade sud du temple à Amon, sur un des môles du pylône. La composition à laquelle elle appartenait figurait une scène rituelle où elle donne l’accolade au dieu Amon, patron des rois kouchites. Après l’écroulement du pylône, il est probable que le relief fut symboliquement enfoui par le clergé du temple afin de protéger la valeur symbolique de l’image des vols et destructions.
Le panneau de Soleb avait été découvert brisé en petits morceaux durant les fouilles de Soleb par la mission Schiff Giorgini, dans les années 1960. Il a été restauré dans le cadre du projet QSAP Soleb, dirigé par Claude Rilly1 , il y a deux ans. Il s’agit d’un des rares témoins du premier état du temple de Soleb, bâti sous le règne du pharaon Amenhotep III, vers 1460 avant notre ère. Il représente ce roi exécutant une libation d’eau fraîche devant le dieu Nebmaâtrê, qui n’est autre que la forme divinisée du même pharaon. La qualité extraordinaire de la gravure, notamment celle des hiéroglyphes, est caractéristique du règne d’Amenhotep III, qui est une des plus brillantes périodes de l’art égyptien. Ces monuments pharaoniques bâtis sur le sol soudanais ont exercé une profonde influence sur les civilisations locales, les royaumes de Napata et de Méroé : ainsi le nom de Nebmaâtrê sera-t-il réutilisé comme nom de couronnement par deux des rois de Méroé.
La stèle funéraire de la dame Ataqelula est sans aucun doute la plus belle inscription méroïtique trouvée à ce jour à Sedeinga, un site qui en a pourtant livré plusieurs dizaines. Elle a été exhumée lors des fouilles du Secteur II de la nécropole. Elle date de la fin du IIe siècle ou du début du IIIe siècle de notre ère et commémore une femme issue d’une puissante famille de Sedeinga, avec des ramifications sur tout le royaume. Ataqelula était en effet la fille d’un prêtre de Kerma et comptait parmi ses ancêtres des membres de la famille régnante de Méroé. La stèle a été retrouvée en position verticale, coincée par les briques de la chapelle funéraire II T 355 qui s’était effondrée. Cette position lui a évité l’humidité du sol et l’érosion du vent, ce qui explique son étonnant été de conservation. Elle a notamment gardé une grande partie de ses pigments et l’on peut voir ainsi que les lettres sont teintées de rouge et les lignes marquées en bleu, une couleur très fragile qui généralement a disparu.
Fondée en 1967 sur une initiative de Jean Vercoutter, la Section française de la direction des antiquités du Soudan (SFDAS) a été officiellement créée en 1969. Chargée de coopérer avec la Direction des Antiquités soudanaises dans ses activités de terrain, fouilles et prospections, elle a participé aux opérations de sauvetage de la campagne de Nubie, qui précéda la mise en eau du lac de retenue du barrage d’Assouan dans les années 1960. Elle fut ensuite chargée de poursuivre le recensement systématique des sites de la vallée du Nil au sud de ce lac. Elle a également effectué plusieurs fouilles programmées et est aujourd’hui présente sur l’ensemble de la vallée du Nil Moyen, sur les sites archéologiques de Saï, Sedeinga, el-Hassa, Kadrouka et Soleb. La SFDAS est une unité mixte des Institut Français de Recherche à l’Étranger (Umifre), sous double tutelle CNRS / MEAE. Elle est intégrée depuis le 1er janvier 2010 à l’unité de service et de recherche Afrique au Sud du Sahara (USR3336).
- 1Chercheur CNRS au laboratoire Langage, langues et cultures d'Afrique noire (LLACAN, UMR8135, CNRS / Inalco)