OpenEdition relance son Lab

Humanités numériques

Les axes de recherche d’OpenEdition Lab ont été redéfinis début 2024 : ils permettront de déployer, selon des approches thématiques et transversales, des enquêtes collaboratives sur les pratiques de science ouverte en sciences humaines et sociales. OpenEdition Lab a vocation à devenir un pôle de recherche de référence sur les pratiques de science ouverte en SHS en inscrivant OpenEdition au sein d’un réseau de recherche national et européen.

OpenEdition a relancé son Lab à la faveur de l’arrivée de Simon Dumas Primbault en tant que professeur junior CNRS de science ouverte en SHS. OpenEdition Lab a pour mission de définir, de soutenir et d’organiser un programme de recherche interdisciplinaire, fondamentale et appliquée, sur les pratiques de production, circulation, appropriation et régulation des savoirs de sciences humaines et sociales en régime de science ouverte.

Sur un spectre allant des plus ouvertes et expérimentales aux plus opérationnelles et appliquées, les études menées permettront au Lab de participer au développement de la science ouverte par des publications et des conférences universitaires, par l’exposition des données et méthodes de sa recherche, par le développement et le prototypage d’outils logiciels nouveaux et de nouvelles formes de communication, par le retour d’indicateurs et la rédaction de rapports à destination des politiques publiques, autant que par l’enseignement interdisciplinaire aux niveaux licence et master.

Axes de recherche

Axe 1. Usages et usagers

Cet axe de recherche a pour but de documenter largement les usagers des plateformes de science ouverte et leurs pratiques informationnelles. Qui sont ces usagers – universitaires, galeries-bibliothèques-archives-musées (GLAM), journalistes ? Quels « usages inattendus » sont faits de ces contenus et services – entreprises privées, associations à but non lucratif et ONG ? Quelles pratiques de recherche, production, consommation et circulation d’information et de savoir ces publics déploient-ils sur ces plateformes et entre les plateformes ? Quelles compétences numériques et documentaires ces publics possèdent, développent ou nécessitent-ils pour naviguer au sein de l’écosystème de la science ouverte ? Comment ces pratiques et compétences s’appuient, détournent ou ignorent les outils, métadonnées et standards existants ? En retour, et afin de favoriser une expérience utilisateur intégrée, selon quelles modalités est-il possible d’inclure ces publics et les résultats de l’observatoire dans la conception et le prototypage d’interfaces, de formations ou d’outils nouveaux ?

Axe 2. Qu’est-ce que la « science ouverte » ?

La science ouverte fait figure d’objet frontière : ici elle est envisagée comme une libre circulation et appropriation des connaissances dans un idéal de partage et d’universalité, là elle est vantée comme une réaction à l’oligopole des grandes maisons d’édition scientifique, là encore, c’est un mot d’ordre pour la création et la gestion de communs de la connaissance, en particulier en y incluant des savoirs invisibilisés ou marginalisés. Dans ce contexte, quelles définitions, quels rôles et quelles fonctions la science ouverte peut-elle ou doit-elle jouer ?

Cet axe se propose de développer une meilleure compréhension de l’« écosystème » qui est la condition de possibilité des savoirs et des dispositifs de la science ouverte. Cette compréhension permet alors de mettre en exergue la très grande diversité des acteurs de la science ouverte, de leurs intérêts et des compétences qu’ils déploient, ainsi que de mettre en lumière la grande complexité des dynamiques d’un tel écosystème.

Axe 3. Collaborer au développement : inscrire le Lab dans les missions de maintien et de développement d’OpenEdition

Dans une dynamique d’expérimentation et tirant partie des résultats de l’axe 1 autant que de son inscription au sein de l’infrastructure, OpenEdition Lab a également pour mission de s’insérer dans les besoins fonctionnels formulés par OpenEdition et ses communautés pour en dégager des axes de recherche (en science des données, SIC, UX/UI, ou sociologie) et de collaborer à l’écriture de demandes de financements afin de mener ou d’encadrer le prototypage d’outils expérimentaux pour favoriser la découvrabilité des contenus et la navigation des usagers sur les plateformes.

Cet axe permet d’inscrire le Lab dans les missions de maintien et de développement de l’infrastructure en articulant l’activité de recherche avec les besoins fonctionnels de l’infrastructure OpenEdition. Cette articulation se fera au cas par cas, selon les projets, de façon à trouver le juste équilibre entre les activités de recherche et les besoins fonctionnels.

Axe 4. Données ouvertes

Le portail OpenEdition présente une importante ressource pour la communauté de recherche. Il compose, en effet, un vaste ensemble documentaire, composé d’une grande diversité de formes éditoriales et de langues. À cet ensemble est associé un gisement de données décrivant les usages du lectorat. Dans la continuité des études prospectives sur OpenEdition Data, cet axe a pour but de faciliter l’accès aux données des différentes plateformes d’OpenEdition et s’inscrit dans le mouvement de l’open data. L’objectif est de valoriser l’information contenue dans ces ressources. Plusieurs types de données sont aujourd’hui déjà diffusés mais ne sont pas accessibles facilement comme, par exemple, les données statistiques, les données d’OpenEdition Lab, le dépôt OAI-PMH et le système d’information CORE. D’autres données pourraient être valorisées comme les textes intégraux des contenus des quatre plateformes, les citations dans les publications de Journals et Books, l’état des collections ou encore des logs serveurs.

Interdisciplinarité

Ce projet général de « recherche sur la recherche » se doit d’être fortement marqué par l’interdisciplinarité. Le plan de recherche s’articule au croisement de quatre perspectives :

  • les science and technology studies (STS) permettent de comprendre les infrastructures et les plateformes de science ouverte comme des dispositifs socio-techniques qui prennent place dans un écosystème plus large au sein duquel naviguent les usagers ;
  • les sciences de l’information et de la communication (SIC) mettent en lumière comment, au contact de ces plateformes et se déplaçant de l’une à l’autre, les usagers déploient des pratiques d’appropriation, contournement, détournement afin de satisfaire leurs besoins d’accès, de lecture-écriture, d’appropriation-production de données ;
  • la science des données permet d’exploiter les traces laissées par les pratiques, grâce à des outils permettant d’identifier des régimes d’engagement entre données et entre plateformes ;
  • les critical data studies permettent de développer un point de vue critique quant à la production et l’utilisation de données, en particulier l’aspect situé des savoirs produits par ce biais et ses conséquences sur la construction d’une objectivité incarnée, ouvrant ainsi la voie à un retour réflexif sur notre rapport au terrain.

Étude des pratiques : approche et méthodologie

Les publics, les pratiques et les politiques de science ouverte, jusque dans le monde extra-académique, changent aussi rapidement que les outils numériques qui les rendent possibles. Il est par conséquent nécessaire de pouvoir documenter, analyser et équiper ces pratiques de façon suivie en articulant :

  • une approche qualitative basée sur des dispositifs d’enquête issus de la sociologie et de l’ethnographie (entretiens, questionnaires, observations, groupes de discussion) ainsi que de la sémiotique (étude des interfaces, des classifications documentaires, des outils de recherche et hiérarchisation du contenu) ;
  • avec une approche quantitative, ou computationnelle, qui fera fond sur des sondages, les traces d’usages et des outils précédemment développés à OpenEdition Lab ; plus généralement, les outils méthodologiques seront des modèles de séquences et de thèmes, des réseaux neuronaux sous formes de graphes, de l’apprentissage de représentations ou des modèles de recherche d’information à base de clics.

Les terrains et les dispositifs d’enquête qui y sont déployés par OpenEdition Lab sont :

  • multi-situés, d’abord à travers les trois infrastructures de COMMONS, et au-delà en suivant les usagers et tenant compte de leur contexte matériel et institutionnel ;
  • multi-scalaires, portant attention à diverses « unités d’enquête » : des usagers individuels, aux projets, aux communautés ;
  • multitemporels : sur la base de sondages ponctuels, d’études d’impact avant/après une formation, ou du suivi au long cours d’enquêté·es choisi·es ;
  • modulaires, autant que possible, articulés sur la base de plusieurs sous-protocoles, qui à leur tour seront d’emblée réplicables – et non nécessairement reproductibles – permettant ainsi aux acteurs et actrices de redéployer tout ou partie des dispositifs d’enquête en fonction des besoins et des moyens, assurant notamment la continuité de l’observatoire et le partage du commun ;
  • éthiques et conformes au RGPD, donc toujours accompagnés d’un plan de gestion des données récoltées et produites spécifiant les méthodes et outils de traitement, d’annotation, de conservation et d’exposition des données et des résultats des enquêtes.

Contact : simon.dumas-primbault[at]openedition.org, responsable du service Lab.

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